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Les Etats-Unis ont condamné ce vendredi 17 janvier l’emprisonnement par la Russie de trois membres de l’équipe d’avocats du leader défunt de l’opposition Alexeï Navalny, estimant qu’il s’agissait d’une nouvelle tentative de Moscou d’éradiquer la dissidence.
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« Il s’agit d’un nouvel exemple de la persécution des avocats de la défense par le Kremlin dans ses efforts pour saper les droits humains, subvertir l’Etat de droit et réprimer la dissidence », a déclaré le porte-parole du département d’Etat, Matthew Miller, dans un communiqué.
Les autorités russes sont engagées dans une campagne pour étouffer les détracteurs de Vladimir Poutine, en particulier des proches de Navalny et ceux dénonçant l’assaut russe contre l’Ukraine.
Cinq et trois ans de détention
Les avocats Alexeï Liptser, condamné à 5 ans de détention, Igor Sergounine, condamné à 3 ans et demi, et Vadim Kobzev, condamné à 5 ans et demi, avaient été arrêtés en octobre 2023, alors que l’opposant numéro un au président russe était encore vivant. Ils étaient accusés de participation à l’organisation du défunt, classée « extrémiste » par la Russie.
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« Nous sommes jugés pour avoir transmis les pensées de Navalny à d’autres personnes », a dénoncé devant la cour fin décembre l’avocat Vadim Kobzev, cité par Novaïa Gazeta. La justice leur reproche d’avoir transmis à Alexeï Navalny, incarcéré en Russie à partir de janvier 2021 jusqu’à sa mort en prison le 16 février 2024, des informations lui permettant prétendument de « planifier, préparer (…) et commettre des crimes extrémistes » depuis sa cellule, selon les enquêteurs.
Le procès se déroulait depuis mi-septembre devant un tribunal de Petouchki, dans la région de Vladimir, à l’est de Moscou, où se trouve également une des prisons où Alexeï Navalny avait été un temps incarcéré. L’ensemble des débats a eu lieu à huis clos, comme c’est généralement le cas dans ce genre d’affaires.
Selon un communiqué du tribunal, Igor Sergounine a plaidé coupable, contrairement aux deux autres avocats. Lors de l’audience vendredi, Alexeï Liptser a salué quelqu’un d’un geste de la main et d’un petit sourire depuis la cage aux barreaux blancs réservée aux accusés. Les autres sont restés silencieux et concentrés, selon des journalistes de l’AFP présents.
« Prisonniers politiques »
D’après un avocat de la défense, Roman Karpinski, le dossier était fondé sur des écoutes des réunions en détention de Alexeï Navalny avec ses avocats, une « violation du secret professionnel » de la part de l’administration pénitentiaire, qui a transmis ces enregistrements aux enquêteurs.
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L’opposante russe en exil Ioulia Navalnaïa, veuve d’Alexeï Navalny, a martelé sur X que ces avocats étaient « des prisonniers politiques et (devaient) être libérés immédiatement ».
L’ONG Amnesty International a critiqué une « tentative honteuse de réduire au silence ceux qui ont osé défendre Alexeï Navalny ». L’Allemagne a appelé à leur libération, tout comme les Pays-Bas.
Depuis le début de l’assaut contre l’Ukraine, en février 2022, la répression frappe toutes les voix dissidentes en Russie. Les avocats d’opposants étaient autrefois rarement emprisonnés, bien que soumis à une surveillance et à des menaces croissantes. Mais ces trois dernières années, plusieurs d’entre eux ont fui leur pays pour échapper à une arrestation, à l’instar de deux autres défenseurs de Navalny, Olga Mikhaïlova et Alexandre Fedoulov.
« Résister »
Charismatique militant anticorruption et anti-Kremlin, Alexeï Navalny avait été arrêté à Moscou en janvier 2021 à son retour d’Allemagne, où il avait été hospitalisé après un empoisonnement qu’il imputait au Kremlin, qui a toujours nié. Il avait ensuite été condamné à plusieurs peines, dont une de 19 ans de prison en août 2023 pour « extrémisme ».
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Navalny communiquait sur les réseaux sociaux essentiellement via des messages transmis à ses avocats, dans lesquels il dénonçait notamment l’offensive en Ukraine et appelait les Russes à « résister ».
Son organisation, le Fonds de lutte contre la corruption (FBK), est classée « extrémiste » en Russie depuis 2021. Les circonstances de sa mort dans une colonie pénitentiaire de l’Arctique restent obscures.
La semaine dernière, Ioulia Navalnaïa a affirmé que la Russie refusait d’enlever son défunt mari de la liste des terroristes et extrémistes. « Poutine fait cela pour vous effrayer. Il veut que vous ayez peur de même mentionner Alexeï », a-t-elle dit.
Nombre de ses anciens collaborateurs, réfugiés à l’étranger, travaillent désormais avec sa veuve, qui a repris le flambeau de son mari sans pour autant réussir à unir une opposition divisée et éparpillée à l’étranger.